Les professionnels de la comptabilité, acteurs de l’ESG dans les entreprises

Durée 3 minutes

Ce qui ne se mesure pas, n’existe pas. Or les experts comptables sont les pros incontestés des données chiffrées. Ils devraient donc devenir incontournables dans les politiques de développement durable des entreprises, grandes ou petites. Ce qu’en pensent deux professionnels expérimentés et engagés.

iStock-1365436662-min.jpg

Sarah G. est experte-comptable et commissaire aux comptes. Chargée du pôle Développement durable et RSE du groupe Fideliance, Sarah G. donne également des cours à des étudiants en finance, ainsi qu’à des experts comptables.

Jean-François C. est lui aussi expert-comptable et commissaire aux comptes dans le groupe Fideliance. Par ailleurs, il préside la commission RSE de l’Ordre des experts-comptables de Paris et Ile-de-France et il anime les podcasts Compta for Good*.

Le cliché voudrait que plongés dans leurs écrans de chiffres et d’indicateurs, les comptables, les experts comptables ou les commissaires aux comptes ne soient que peu concernés par les préoccupations environnementales ou sociétales. Il n’en est évidemment rien. Lorsque les entreprises doivent faire face à de nouveaux défis, les professionnels du chiffre sont nécessairement impliqués. Les données quantitatives sont alors pour eux l’outil avec lequel ils vont aider les chefs d’entreprise à prendre les meilleures décisions. Dans le domaine financier bien sûr, mais aussi de plus en plus fréquemment dans des domaines extra-financiers, c’est-à-dire environnementaux, sociétaux et de gouvernance. « La performance financière seule ne paraît plus suffisante, estime Sarah G., aujourd’hui on exige des entreprises, pour qu’elles soient durables, une performance globale qu’on peut mesurer en s’appuyant à la fois sur des indicateurs financiers classiques mais aussi sur des indicateurs extra-financiers ».

Les grandes entreprises aiguillonnées par la loi

L’évolution est rapide. Déjà les grandes entreprises et les entreprises cotées se sont attelées à mesurer leur impact environnemental, social et à une plus grande transparence de leur gouvernance. Elles le font de leur propre initiative pour améliorer leur image de marque ou parce que le cadre réglementaire, de plus en plus précis sur ces sujets, l’exige. Ainsi, la directive 2014/95/EU encadre la publication des données dites non financières des grandes entreprises qui doivent les publier dans leurs rapports annuels. À ce jour, en France, sont concernées les sociétés cotées réalisant plus de 20 millions d'euros pour le total du bilan ou ayant employé 500 salariés au cours de l’exercice. Pour les sociétés non cotées, le seuil s’élève à 100 millions d'euros pour le total du bilan et 500 pour le nombre moyen de salariés. Mais rien ne dit que ces seuils ne seront pas appelés demain à être plus contraignants.

Les indicateurs environnementaux ont encore besoin d’être affinés

Les PME ne sont pas soumises aux mêmes exigences de publication, mais beaucoup de dirigeants ont compris tout l’intérêt stratégique des indicateurs extra-financiers pour sécuriser leur développement et manager leurs équipes. Jean-François C. l’observe quotidiennement : « On assiste à un profond mouvement sociétal qui attend des changements de la part des entreprises. Aujourd’hui, beaucoup de dirigeants aimeraient être les acteurs de ces changements, mais ils ne disposent pas encore de tous les indicateurs dont ils auraient besoin. Par exemple, dans le domaine de l’environnement, la réalité reste encore floue. La création d’indicateurs environnementaux est un chantier considérable qui relève d’un travail réglementaire international et national. Quand ces normes seront complètement établies, je pense que l’expert-comptable sera au cœur de ces sujets-là, car c’est lui qui sera le plus à même de recenser avec précision les données concrètes telles que les kilomètres parcourus, les kilowatts/heures ou le nombre de mètres cubes d’eau consommés, ainsi que tous les éléments sur lesquels il est possible d’agir ».

Des PME et des TPE avancent sur la responsabilité sociale et environnementale

Déjà, sans que la réglementation ne les y oblige, des entreprises de toute taille se soumettent à la norme ISO 26000 dédiée à la responsabilité sociale et environnementale (publiée en 2010 et mise à jour régulièrement). Il s’agit d’un cadre plus souple que les autres normes ISO, plus anciennes et mieux connues. L’application de la norme ISO 26000 peut être évaluée par des organismes indépendants qui attribuent des notes, mais pas encore une véritable certification en bonne et due forme. D’autres entreprises s’engagent plus loin et introduisent un objectif social ou environnemental au cœur même de leur mission, comme l’explique Sarah G. : « La société dite “à mission” créée par la loi Pacte permet d’intégrer aux statuts juridiques de l’entreprise une “raison d’être” assortie d’objectifs statutaires. Il existe environ 800 sociétés qui ont déjà adopté cette forme, dont environ 70 % sont des TPE. Afin que cela ne se résume pas à du “green washing”, il doit y avoir un auditeur pour vérifier les engagements opérationnels ». Et, évidemment, il est nécessaire qu’un comptable ait tenu les comptes.

Face aux actuelles mutations, les experts comptables se montrent confiants : « Il y a dix ans, certains évoquaient la fin de la comptabilité à cause du digital. Or, à l’inverse, on constate chaque année une croissance régulière du secteur. Aujourd’hui, même s’il y a encore un écart entre les discours et la réalité de terrain, le mouvement vers davantage de responsabilité sociale et environnementale est engagé. Il faudra l’accélérer et les experts comptables seront alors au front car, lorsqu’on veut agir, il faut aller sur le terrain et compter. C’est une chance formidable pour les jeunes qui entrent dans ce métier aujourd’hui car il va être encore plus passionnant », anticipe Jean-François C.

 

* https://www.oec-paris.fr/comites/comite-rse/#Compta%20for%20good%20-%20La%20RSE,%20kezako

Pour en savoir plus

Expertise-comptable : s’engager pour un métier utile au quotidien

Envie d’un métier qui ait du sens, qui soit utile aux autres et à la société ? Avec les métiers de l’expertise comptable, vous pourriez bien trouver votre bonheur !

Comptabilité : une diversité de métiers

Un des principaux attraits des métiers de la comptabilité, c’est la variété. Surprenant ? Découvrez un très large éventail de métiers et de spécialités.

Expert-comptable : un métier de conseil avant tout

Le métier d’expert-comptable suppose certes d’apprécier l’analyse de résultats mais aussi d’aimer aider et conseiller. Ce professionnel accompagne ses clients pour faire les bons choix au quotidien.